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François de Malherbe

Œuvres

Édition d'Antoine Adam Feuilleter le livre

Parution le 24 Novembre 1971
Bibliothèque de la Pléiade, n° 231
Achevé d'imprimer le 10 Octobre 1971
1128 pages, rel. Peau, 105 x 170 mm

39.20 € Acheter le livre

ISBN : 2070106527
Code distributeur : A10652
GENCOD : 9782070106523

Ce volume contient

Poésies - Lettres à divers destinataires - Lettres à Peiresc.

«De son vivant il avait été le maître incontesté de la nouvelle littérature. Il resta, à travers le siècle, l'homme qui avait fait régner l'ordre et la raison dans les lettres françaises, qui avait assuré le triomphe du bon goût, qui avait fixé les lois définitives de notre poésie. Ceux qui ne reconnaissaient pas son autorité n'étaient, aux yeux des gens sérieux, que des "extravagants". Qu'est-il devenu pour nous? [...]
Certains trouvent dans ses vers une étrange modernité. Ils l'admirent d'avoir été si exigeant, d'avoir tellement insisté sur l'idée de contrainte, et d'en être venu, croient-ils du moins, à y réduire l'essence de l'art. Conception qui ne date pas de Paul Valéry et qui peut se réclamer des vers fameux de Gautier. Mais conception paradoxale lorsqu'elle est poussée jusqu'à ses extrêmes limites, puisqu'elle en viendrait à juger une œuvre par la souffrance que son auteur s'est imposée pour l'écrire. Ce n'est pas parce que Malherbe a beaucoup peiné sur ses vers qu'il peut encore nous plaire aujourd'hui.
C'est d'abord que dans son œuvre les admirables réussites abondent. C'est tantôt l'équilibre heureux d'une strophe, tantôt une phrase qui part avec un élan magnifique ou qui se déploie en une sorte de vol harmonieux. Tantôt, c'est très simplement et très profondément un beau vers, aux longues et secrètes résonances. Et sans doute, ces réussites, Malherbe les doit à son effort, aux contraintes de ses exigences. Mais ce n'est pas cet effort, ce ne sont pas ces contraintes qui fondent cette beauté. Ils n'en peuvent être que la condition. Nous n'avons pas tellement à les connaître. C'est le chef-d'œuvre qui compte, c'est le ravissement qu'il produit en nous.
Cette joie en présence de la beauté n'est pas la seule au surplus que l'œuvre de Malherbe soit capable de nous donner. Si nous sommes sensibles à cette grande réalité qu'est l'histoire des civilisations, comment ne sentirions-nous pas, dans sa poésie, l'expression tout à fait éminente d'une époque de la culture européenne, celle qui succède à la Renaissance, et qui correspond à l'état politique et social de l'Europe après la grande crise de la Réforme ? L'ordre qui domine toute l'œuvre de Malherbe, qu'est-il donc que l'expression de l'ordre politique restauré? La majesté de ses vers ne fait que traduire l'exigence
de grandeur qui anime alors les hiérarchies. Et si cette majesté nous semble marquée de froideur, ce n'est pas à Malherbe que nous le devons imputer, c'est à son époque tout entière.
Ce n'est pas réduire l'importance de l'œuvre de Malherbe, ni en diminuer la valeur que d'y voir de la sorte l'expression supérieure de son siècle. Que font, après tout, les grands écrivains, que de donner un langage aux pensées informulées et aux aspirations confuses de leur temps. Leur grandeur n'est-elle pas d'incarner un moment de l'esprit humain et de son histoire? Malherbe est un grand écrivain.»
Antoine Adam.